Source [Boulevard Voltaire] Force est de constater que l’islam n’est pas toujours respectueux du droit des femmes. Il suffit, pour preuve, de prendre l’exemple de la Turquie actuelle. Dans un décret publié dans la nuit de vendredi à samedi, le président Erdoğan a annoncé retirer son pays de la Convention d’Istanbul, premier traité international à fixer des normes contraignantes pour prévenir la violence sexiste. En 2011, Premier ministre à l’époque, il s’était pourtant empressé de la signer. Cette annonce a suscité des manifestations et des protestations, y compris en Europe.
Ses prises de position, apparemment contradictoires, s’adaptent à son intérêt électoral. Les prochaines élections auront lieu en juin 2023 : il lui faut donc commencer à rallier les conservateurs – entendez les islamistes –, d’autant plus qu’il doit faire face à des difficultés économiques croissantes. Des groupes de pression l’appelaient à sortir de ce traité qui, à leurs yeux, nuit aux valeurs familiales « traditionnelles » en défendant l’égalité des sexes, encourage le divorce et « favorise » la communauté LGBT en interdisant toute discrimination en fonction de l’orientation sexuelle.
Que voulez-vous qu’il fît ? Il n’allait pas signer son arrêt de mort politique ! Il a donc cédé à ce lobbying idéologique. Voyez Macron : dans son genre, il s’adapte, lui aussi, aux électorats pour tenter de l’emporter en 2022. Un coup à droite, un coup à gauche, il finira bien par pêcher quelques voix supplémentaires. Voyez-le combattre le séparatisme sans jamais nommer la religion qui pose problème, voyez comme il se complaît dans la repentance tout en prétendant défendre la France ! Erdoğan fait de même – avec une poigne plus dure, il est vrai.
Le CHP, principal parti d’opposition, critique sa décision. La vice-présidente chargée des droits de l’homme a promis de « faire ressusciter » cette convention. Le maire d’Istanbul, l’un des rivaux d’Erdoğan, a déclaré que « cela revient à piétiner la lutte que mènent les femmes depuis des années ». Mais le gouvernement lui-même tente de rassurer : « Nos institutions et nos forces de l’ordre continueront de lutter contre les violences domestiques et les violences contre les femmes », a souligné le ministre de l’Intérieur. L’organisation de femmes conservatrice KADEM, proche du pouvoir, dont une fille du président est membre, a également exprimé son malaise.
À force de faire du « en même temps » à la turque, Erdoğan risque de décevoir tout le monde : trop islamiste pour les uns, pas assez pour les autres. Jusqu’à l’Union européenne – à laquelle la Turquie n’a pas renoncé à adhérer – qui s’en mêle. Le Conseil de l’Europe vient de déplorer le retrait de la Turquie de la Convention d’Istanbul : « Une nouvelle dévastatrice [qui] compromet la protection des femmes. » Erdoğan avait pourtant pris de bonnes résolutions en janvier dernier, assurant, devant les ambassadeurs européens, vouloir « remettre nos relations sur les rails ». Il risque de dérailler, tant il zigzague.
Mais pourquoi se gêner, puisqu’on lui pardonne tout et qu’on ne proteste que pour la forme ? Il tient dans ses mains des cartes maîtresses : en vertu d’un accord signé avec l’Union européenne, la Turquie s’est engagée, en 2016, à restreindre l’arrivée de migrants en Europe en échange d’une aide économique. Un bon moyen de chantage. Sans compter que la plupart des pays européens n’osent pas condamner trop sévèrement l’islamisme pour ne pas froisser une partie de leurs ressortissants de confession musulmane, ni compromettre leurs relations avec le Proche-Orient. Pour Erdoğan, la lâcheté occidentale, c’est du pain bénit !
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