Source [Le Salon Beige] Grégor Puppinck, directeur du Centre européen pour le Droit et la Justice qui a accompagné les parents de Vincent Lambert dans la défense de leur fils auprès des instances internationales, écrit dans Valeurs Actuelles :
Vincent Lambert est mort.
C’est bien plus la tristesse que le soulagement qui nous envahit ce matin.
La tristesse de sa mort tout d’abord ; de la mort d’un homme sans défense qui aurait pu vivre longtemps encore, entouré d’amour et de soins.
La tristesse aussi pour notre beau pays qui se révèle, d’un coup, moins humain.
Ceux qui ne voyaient en son visage que souffrance et indignité ont obtenu sa mort.
Ceux qui se reconnaissaient en lui, ont perdu un frère.
En faisant mourir Vincent, nous avons choisi entre l’amour d’une mère et le désespoir d’une épouse.
Il y aura un avant, et un après Vincent Lambert. Le monde entier s’est trouvé à son chevet, certains pour s’attendrir, d’autres pour s’indigner, la foule des media criant « débranchez-le ! ». Rarement la mort d’un homme sans défense a provoqué tant de passions, sinon peut-être il y a deux mille ans. Avec Vincent Lambert est mort notre respect des plus faibles. C’est cet amour que nous avons essayé de tuer. Il fallait sacrifier publiquement Vincent pour délivrer la société de l’antique charité. Il fallait qu’il meure pour prouver notre pouvoir sur la mort. Comment expliquer autrement l’acharnement des plus puissants, et l’aveuglement des juges.
Mais l’après Vincent Lambert n’a rien de nouveau.
C’est l’éternel retour au culte de la force et de la volonté ; le retour à l’époque, pas si lointaine, où l’on supprimait les vies « qui ne méritent pas d’être vécues », où, comme aujourd’hui, on se faisait juge de la dignité de la vie d’autrui. Ce monde inhumain que nous découvrons à présent, fait d’eugénisme, d’euthanasie et d’enfants sur commande, a déjà été tenté au début du siècle dernier. Mais c’est maintenant qu’il trouve à s’appliquer pleinement. C’est dans ce monde dévoyé que le sacrifice de Vincent nous fait pénétrer plus avant.
Dans ce monde où l’on fait naître et mourir selon les désirs des puissants du moment, le souvenir de l’amour véritable s’estompe peu à peu. Il nous faut à présent démontrer jusqu’à la valeur de la vie, ou l’utilité d’un père et d’une mère. Nous ne savons plus ce qu’est le bien. Seuls le désir et la capacité à désirer ont encore de la valeur. Nous entrons dans un monde où plus rien ne vaut que la maîtrise impossible de son propre destin.
Dans ce monde, à la place du désespoir des rêves de puissance, il nous faudra remettre l’amour, retrouver la charité qui seule peut sauver notre humanité ; elle est victoire sur la mort et source de vie.
Sans l’amour de ses parents, Vincent serait mort de soif depuis longtemps, dans l’indifférence et le silence, comme tant d’autres avant lui.
Sans l’amour de ses parents, nous ne saurions pas que l’on tue, en France, les personnes handicapées.
Nous poursuivrons le combat, sur les pas de Mgr von Galen dont le courage et la foi eurent raison du programme nazi d’euthanasie. Pour Vincent et tous ses compagnons d’infortune dont la vie ne tient plus qu’à un fil, nous demandons au Comité des droits des personnes handicapées de l’ONU de condamner la France et sa législation.
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