Les élections législatives de 2022 ont laissé la place à une composition inédite de la chambre basse. Déjà en 2017, l’avènement du parti macroniste avait rebattu les cartes et après bientôt sept ans, le paysage politique français et le rapport au pouvoir semblent avoir évolué dans les partis les plus installés à l’Assemblée nationale.
Recomposition verticale…
Alors que Nicolas Sarkozy était parfois décrit comme un « hyper-président » pour son appétence à communiquer et à s’occuper des affaires du gouvernement, il semblerait que le règne Macron ait passé un cap en la matière. En concentrant les pouvoirs sur sa personne et en se plaçant au cœur de la communication de l’exécutif, le président est au centre du jeu. Une stratégie payante puisqu’il demeure au pouvoir avec des résultats électoraux assez satisfaisants depuis maintenant sept ans. Ce qui peut en revanche étonner, c’est l’unité du camp présidentiel. Exit les « frondeurs » socialistes de François Hollande ou les multiples courants qui ont pu exister à l’UMP puis chez les LR. Pour la majorité, les alliés Horizons et Modem sont des partenaires dociles. Du côté des deux principaux partis d’opposition, c’est aussi la figure du chef qui prévaut. Le Rassemblement National, premier groupe d’opposition à l’Assemblée en termes de nombre, s’il a changé de président, demeure le parti de Marine Le Pen et ses élus sont tenus à une discipline stricte que ce soit localement ou au niveau parlementaire. La France Insoumise, dont le « coordinateur de l’équipe opérationnelle » est Manuel Bompard, demeure la machine électorale de Jean-Luc Mélenchon. Ces trois premiers partis sont centralisateurs et attachés à une figure iconique, la « diversité » d’opinions et de courants n’est pas le fort de ces formations. Emmanuel Macron devra céder la main, Jean-Luc Mélenchon aura 75 ans pour la prochaine présidentielle quand Marine Le Pen semble pour l’heure la plus à même de se maintenir dans son rôle.
…Stabilité horizontale
Centralisés, ces partis ont montré de sérieuses limites à s’implanter localement. Le RN dispose seulement d’une dizaine de villes dont une commune de plus de 30 000 habitants : Perpignan. Le parti de Marine Le Pen est même passé de 1 500 sièges d’élus municipaux en 2014 à 827 en 2020. Lors de ce dernier scrutin, La France Insoumise avait comptabilisé 46 élus municipaux, un score bien moindre que six ans plus tôt quand le Parti de gauche faisait à lui seul 160 élus et que le Front de gauche dépassait les 1 000 sièges. Le parti présidentiel n’a de son côté obtenu que 624 sièges d’élus locaux en 2020 pour environ 150 mairies de plus de 9 000 habitants mais s’est montré incapable de faire main basse sur une grande agglomération. Localement, ce sont les Républicains et les socialistes qui demeurent les plus implantés. S’apparentant parfois à de véritables syndicats d’élus, les deux partis historiques préservent, grâce à une certaine souplesse et à une véritable implantation locale, leur pouvoir. A la tête des régions et des départements, tantôt sous l’étiquette PS ou LR tantôt avec leur propre parti, les barons locaux issus de ces formations n’ont pas été balayés par la vague macroniste.
On donne parfois la « droite parlementaire » et la « gauche parlementaire » pour mortes. Pour l’heure ces deux partis se partagent toujours le gâteau électoral localement et par conséquent au Sénat. La force du parti présidentiel, du RN comme de LFI d’avoir une personnalité pour incarner leurs idées est un atout majeur lors de certains scrutins (présidentiel, législatives et européennes pour les deux premiers) mais leur identité politique et leurs méthodes semblent incompatibles avec un ancrage local. LR comme le PS ont perdu des plumes au cours des sept années passées et se sont révélés incapables de trouver des meneurs charismatiques mais ils n’en demeurent pas moins des « partis-plateforme » ce qui assure leur survie. Autant d’éléments qu’il convient d’envisager en matière de prospective électorale.
Olivier Frèrejacques
Président de Liberté politique
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