Source [Causeur] Le mouvement des Gilets jaunes souffle sa première bougie. Sera-t-elle la seule ? D’aucuns veulent croire que non et préfèrent parler de veille plutôt que d’essoufflement. Une certitude, cette année écoulée n’a pas vu le triomphe d’un Tea Party à la française. Alors que le mouvement français tousse, le modèle américain a su conquérir la présidence et s’implanter au Congrès en sept ans. Des stratégies différentes et un contexte différent pour des idées parfois ressemblantes.
Il y a un an, le mouvement des Gilets jaunes a fait son entrée sur la scène médiatique ; 287 710 personnes ont alors défilé selon le ministère de l’Intérieur, un chiffre brillamment précis et dénoncé comme largement sous-évalué, comme ceux des samedis suivants, et qui est tombé à quelques milliers depuis. Sur Facebook, l’inconnu Éric Drouet avait appelé à une manifestation nationale le 17 novembre. Au printemps, Priscillia Ludosky, tout aussi inconnue, avait publié une pétition en ligne pour demander la baisse du prix des carburants, le thème initial des manifestations. Depuis, le mouvement a manifesté chaque samedi et a obtenu des concessions – dont l’abandon de la hausse de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques – qui, finalement, l’ont divisé, le pouvoir n’ayant pas répondu à toutes les attentes. À ses débuts, il a émis des revendications parfois similaires à celles du Tea Party, mais n’a pas connu la même trajectoire ni quant à son articulation ni concernant sa stratégie et ses succès.
Le 15 mars 2009, le Tea Party entrait officiellement dans l’espace public à l’occasion du Tax Day, la date limite pour rendre les feuilles d’impôts au gouvernement fédéral. Des manifestations eurent lieu dans tout le pays en forme de mise en garde à l’administration Obama. Alors assez confidentiel, le mouvement fut traité avec mépris par les médias ; un présentateur de CNN, Andy Cooper, qualifia les militants de « Tea Baggers », une injure désignant le fait d’avoir ou de mettre un sexe dans une bouche. De nombreuses personnalités reprirent le mot de Cooper, à commencer par le président Obama ou Bill Clinton. Cette opposition des élites renforça les militants, libertariens, républicains ou démocrates, dans leur sentiment d’être méprisés et contribua à la désignation des médias comme des ennemis. En France, face aux Gilets jaunes, le journaliste Jean Quatremer a parlé de « mouvement de beaufs, poujadiste, factieux et rouge brun », ou Christophe Castaner de « séditieux d’ultradroite », nourrissant la rancune d’une population qui manifestait sa colère face au mépris.
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