Source [Valeurs actuelles] Avec une indemnité mensuelle s’élevant à près de 13 300 euros nets par mois et cumulable avec les différentes pensions liées à ses anciens mandats, Alain Juppé aurait bien eu tort de refuser cette aubaine honorifico-financière.
Le 14 février dernier, au lendemain de l’annonce de sa nomination au Conseil constitutionnel, c’est avec des sanglots et des trémolos dans la voix qu’Alain Juppé a fait ses adieux à la mairie de Bordeaux. « Quitter cet hôtel de ville est pour moi un crève-cœur » a-t-il alors déclaré, tout en insistant sur le fait qu’il ne supportait plus « l’esprit public » qui serait « devenu délétère » et «infecté par les mensonges et les haines que véhiculent les réseaux sociaux ». En renonçant à la ville de Bordeaux, dont il était le maire depuis 1995, et en choisissant le Conseil constitutionnel ainsi que le devoir de réserve qui y est associé, Alain Juppé, du haut de ses 73 ans, a incontestablement fait ses adieux à la vie politique française.
Cette nomination faite sur proposition du président LREM de l’Assemblée nationale, Richard Ferrand, apparaît à bien des égards, de la part de la Macronie, autant comme une récompense personnelle qu’une décision purement politique. En effet, une récompense personnelle tout d’abord, tant le soutien vis-à-vis d’Emmanuel Macron qu’affiche ostensiblement Alain Juppé depuis le début du quinquennat n’a jamais souffert d’aucun revers. Une décision politique ensuite, car il est évident qu’avec cette nomination, le chef de l’Etat s’assure d’un soutien de poids au sein du Conseil constitutionnel ; ce qui pourra lui être fortement utile quand ce dernier aura à se prononcer au cours des prochains mois sur différentes lois comme la loi « anti-casseurs » ou encore sur la prochaine réforme constitutionnelle.
Il faut dire qu’avec une indemnité mensuelle s’élevant à près de 13 300 euros nets par mois et cumulable avec les différentes pensions liées à ses anciens mandats, Alain Juppé aurait bien eu tort de refuser cette aubaine honorifico-financière. C’est une fin de carrière en grande pompe qu’offre ici Emmanuel Macron à celui qui aura rêvé toute sa vie d’être président de la République sans jamais avoir été capable de le devenir. A l’heure où les Français n’ont jamais été aussi sensibles à la moralisation de la vie politique, on peut tout de même s’étonner que la Macronie a eu l’audace de nommer un repris de justice qui n’est même pas juriste pour vérifier la conformité des lois avec la Constitution. Cela dit, on l’a vu avec l’affaire Benalla, les amitiés du chef de l’Etat semblent beaucoup plus fortes que la promesse d’exemplarité qu’il a pourtant martelée tout au long de sa campagne électorale.
Qu’a finalement réussi à faire Alain Juppé en 40 ans de vie politique ?
Alors certes, Alain Juppé est assurément un technocrate chevronné et intelligent qui aura passé une grande partie de sa vie à servir son pays à différents postes, mais son bilan politique, malgré ce que prétendent ses plus fervents partisans, est loin d’être brillant. Qu’a finalement réussi à faire Alain Juppé en 40 ans de vie politique ? A redynamiser la ville de Bordeaux ? C’est vrai, mais cela s’est fait en chassant du centre-ville les classes populaires qu’il méprise tant. A réformer en profondeur la France quand il était ministre ou Premier ministre ? On peut en douter, Alain Juppé restera indubitablement dans l’histoire politique de notre beau pays comme celui qui aura réussi piteusement à transformer en 1995 un septennat en un semestre. A rassembler la droite ? En 2016, il n’a même pas été capable de remporter la primaire de la droite et du centre avec, pourtant, comme soutien la quasi-totalité des médias. La vérité est que celui qui a été surnommé « le meilleur d’entre nous » n’aura accumulé que les échecs politiques, notamment au niveau national.
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