Source [Valeurs actuelles] L’accord passé entre le gouvernement français et la Commission européenne, visant à réorganiser en profondeur le groupe public et leader de l'énergie en France, ne relève pas d’une vision industrielle, mais d’une logique financière, déplore le député LR Julien Aubert dans une tribune, cosignée par une trentaine de parlementaires.
Le projet Hercule visant à réorganiser EDF en trois entités fait peser sur la souveraineté française un risque inacceptable. Certes, l’accord entre le gouvernement français et la Commission européenne est une grande avancée avec une augmentation du tarif de rachat de l’électricité nucléaire aux concurrents d’EDF (ARENH) qui améliorera la situation d’EDF. Néanmoins, corriger une absurdité liée au dogme de la concurrence n’autorise pas à commettre une énormité au nom de la même idéologie !
Rappelons que le prix à payer pour ce rééquilibrage de l’ARENH serait la scission d’EDF. Le nucléaire français serait logé dans une société dite « Bleue » 100% publique, les activités concurrentielles (comme les énergies renouvelables) feraient partie d’une société « Verte », dont un tiers du capital serait mis en bourse. Le projet a évolué car désormais, l’arc en ciel s’est renforcé d’une troisième couleur avec « Azur », pour l’hydroélectricité, qui serait une filiale de « Bleue ».
Le gouvernement semble considérer que le démembrement serait une solution intelligente. Il ne répond pas à la question fondamentale : pourquoi devrait-on séparer le nucléaire des autres énergies ? N’est-ce pas l’inverse qui a été affirmé pendant des années en louant la complémentarité des énergies ? La rente nucléaire n’a-t-elle pas servi à alimenter pendant des années le subventionnement des énergies renouvelables ?
Avoir un acteur unique qui a la main sur le pilotable et l’intermittence est une chance pour bien coordonner la production. Le fait même que le meccano EDF n’ait cessé de bouger - tantôt deux entités, tantôt trois - démontre qu’il ne procède pas d’une vision industrielle, mais d’une pure logique financière. L’objectif est bel et bien de privatiser le Vert et mettre en concurrence l’Azur.
Dans EDF « Vert » seront en effet logées les sociétés dont le modèle économique gère des contrats à long terme : EDF renouvelable avec les contrats de rachat à 20 ans, Dalkia avec la gestion des réseaux de chaleur à 20 ans, et plus incongrue la présence d’ENEDIS, activité régulée et non concurrentielle qui gère les concessions de longue durée du réseau de distribution publique entre les collectivités locales propriétaires du réseau et ENEDIS.
Ces trois activités, débarrassées de la présence de l’État, deviendront très attractives pour les marchés financiers ! Sans parler d’EDF commerce qui sera soumis aux mêmes règles que ses concurrents car 100% de l’ARENH seront mis sur le marché. Privatiser ENEDIS c’est le couper de RTE pour lequel il existe une logique de complémentarité industrielle. Cela remettrait en question surtout la péréquation tarifaire, le service public et les tarifs régulés.
Mais l’aspect le plus dangereux de ce projet est la filialisation des barrages hydroélectriques, qui sont le coussin d’amortissement du système électrique en cas de blackout. Le rêve ininterrompu de la Commission est de les mettre en concurrence. Cela frise l’obsession. Cette société Azur ne sera pas reconnue comme un service d’intérêt général, encore moins comme une quasi-régie, solution qui serait pourtant préférable pour protéger de la mise en concurrence nos deux cent concessions, qui vont alors être mises à la découpe.
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